Il est un aspect du pardon qu’il est impossible à notre époque, de passer sous silence sans malhonnêteté : je veux parler du pardon à accorder — ou à refuser — au cruel adversaire qui a couvert le monde entier de ruines, de larmes et de sang. C’est un point qui trouble profondément la conscience chrétienne. Mais où est le devoir pour le chrétien ?

De même, que nous n’avons pas la qualité pour pardonner des maux que nous n’avons pas personnellement subis, nous n’avons pas à nous substituer aux victimes et à faire les généreux à peu de frais. Mais est-il sage ou juste de passer avec indulgence sur des crimes commis contre la société ou contre l’humanité ou la morale ?

Quand il s’agit de torts que nous avons personnellement subis, le devoir du Chrétien est clair, c’est le pardon, le pardon jusqu’à soixante-dix fois sept fois, le pardon illimité, mais lorsqu’il s’agit de la violation des lois morales nous n’avons pas à intervenir pour en suspendre les conséquences. Il n’y a qu’un seul moyen, de ne pas tomber sous le coup des lois morales, c’est d’être à leur côté et non contre elles.

Lorsque quelqu’un m’agresse, verbalement ou physiquement, ce n’est peut-être pas forcément juste à moi –ma petite personne- à qui il s’en prend, mais à tout ce que je représente pour lui, à ses yeux, à ce moment-là, qu’il en est conscience ou non… je suis un vieux pour un ados, un français pour un étranger, un ‘H’omme pour une femme, un chrétien pour un athée, un père pour un enfant abandonné…etc Ce serait beaucoup plus simple s’il y avait d’un coté des méchants qui ne font que de vilaines choses, et de l’autre des gentils qui font toujours le bien sauf que la vie est beaucoup plus complexe.

A coté de l’empathie, de la magnanimité ou de la miséricorde, le pardon fait donc aussi appel au discernement. Il faut avoir du cœur et une tête. Il ne faut pas confondre le pardon et la réconciliation. Seul, je peux pardonner mais pour se réconcilier il faut être deux ; il faut donc que l’autre fasse, non seulement, ce qu’il faut pour mais qu’il en est aussi le désir.

Nous n’avons pas à nous substituer à Dieu dans la conduite du monde, ni à lui donner des leçons de justice. Dieu a posé à la base de la constitution de l’univers des lois morales qui ne sont pas bravées sans danger. Les conséquences ne sont que la stricte moisson de ce qui a été semé.