Le commandement que donne Jésus de ne pas résister au méchant doit-il être pris à la lettre, au risque de laisser le méchant triompher et faire bien d’autres victimes innocentes ? Il n’est pas possible d’isoler ce seul verset des Écritures et d’en faire un absolu car dans le passage que l’on appelle « les béatitudes », Jésus nous invite à avoir faim et soif de justice et à s’engager pour elle.

Comment comprendre cette tension entre le « ne pas résister au méchant » et le combat pour la justice ?

Si Jésus est une personne qui encourage, pardonne, manifeste la douceur et la tendresse incarnée pour chacun ; Il a souvent aussi une attitude exigeante et dure, comme dans ces paroles provoquantes, ces paroles impossibles comme celles que je citais dans les deux billets précédents (L’amour impossible et l’impossible pardon)* c’est à dire : Aimer nos ennemis, pardonner sept fois soixante dix sept fois ou ne pas résister au méchant. Ces paroles nous agressent dans ce que nous sentons comme impossible à nos forces, impossible pour notre cœur et nos pensées quand nous sommes blessés, impossible pour notre désir d’un peu de justice en ce monde de brutes.

Mais heureusement, ces mêmes paroles nous disent, à nous dont les oreilles sont écorchées par ces paroles, à nous qui avons du mal aimer et à pardonner, ces paroles de Jésus nous disent que Dieu est le premier, le seul à nous pardonner et à nous aimer, même quand nous en sommes absolument incapables. Nous pouvons donc décider par nous-mêmes s’il faudrait que nous ayons la force de la non-violence, et s’il faudrait que nous ayons celle de combattre pour plus de justice.

Comment ?

Parfois nous dirons non à notre désir de combattre pour la justice, parfois nous dirons non à notre amour de la douceur et à notre idéal de non-violence, mais toujours, nous essayerons de dire non à l’appel de la haine qui résonne en nous.

Souvenons-nous de cette parole de Jésus : « vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi »

Le «  Tu aimeras ton prochain »renvoie à plusieurs citations de la Bible mais en cherchant dans vos concordances vous ne trouverez aucune trace du « et tu haïras ton ennemi » au contraire, Moïse nous dit de ne pas avoir de haine contre notre prochain, de ne pas garder de rancune, de ne pas se venger.

Qui donc nous a enseigné à haïr notre ennemi ?

C’est notre instinct de survie qui nous crie de repousser ce qui fait du mal, ce qui blesse et ce qui tue. Jésus en appelle donc à notre discernement personnel, à notre écoute de Dieu au plus profond de nous-mêmes, puisque c’est en nous que souffle l’Esprit prophétique. Il en appelle à notre sincérité pour user en conscience de la non violence ou du combat pour la justice ; c'est dans l’écoute de nous-mêmes qu'il y a une recherche à faire pour trouver la meilleure réponse possible aux diverses situations vécues.

Jésus sait que ce n’est pas facile. Il le sait par expérience. C’est un combat, d’abord un combat contre une part de nous-mêmes. Jésus a résisté à la méchanceté des pharisiens accablant leurs fidèles, Jésus a résisté contre la méchanceté de ceux qui remplaçaient la prière par un triste commerce.

Pour conclure, je me permets de citer le Pasteur Marc Pernot « …Mais Jésus, avant toute chose a résisté à sa propre méchanceté, luttant pied à pied contre la racine du mal en lui-même, avec l’aide de Dieu, avec un travail d’appropriation des paroles de la Bible. »


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