Lire, écouter des hommes ou des femmes dont les références, les modes de raisonnement et les curiosités nous emmènent loin de l’univers qui nous est familier est un exercice saint et fructueux. C’est l’occasion, lors une telle démarche,  de s’extraire de son sillon et de regarder son propre questionnement avec d’autres yeux.

Je cherche une nouvelle voie pour comprendre le Jésus des Evangiles, qui est le symbole central de ma tradition chrétienne mais dont l’image me travaille constamment car elle en fait un personnage porteur d’un message encombré de légendes dont il faut se débarrasser si l’on veut rendre audible son enseignement aujourd’hui.

Comment se comporterait-il face au monde actuel ?  Eviterait-il de donner son avis  sur certain sujet brulant ?

Nous sommes outrés du comportement de certains hommes à l’encontre des femmes et c’est vraiment d’actualité ! Nous sommes prompt à juger la religion musulmane à ce sujet mais sommes-nous réellement différents ?

Au temps de Jésus, les femmes étaient traitées par la population masculine à peine mieux que du mobilier. Ne lit-on pas dans la Genèse que la femme fut créée uniquement comme aide pour que l’homme ne soit pas seul ? Plus tard, les écrivains bibliques des dix commandements en rajoutent : « Tu ne convoiteras point la maison de ton prochain; tu ne convoiteras point la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, ni son âne, ni aucune chose qui appartienne à ton prochain. » Ex. 20 ; 17. Les femmes sont définies comme un bien, une propriété de celui qui la possède. Les choses ont un peu changé dans notre civilisation mais à quel prix !

Pourtant Jésus avait mis un coup de pied dans la fourmilière. Il refuse d’accéder à la demande de Marthe qui veut que Marie regagne sa place… la cuisine. Et Jésus de répondre : « ... Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour beaucoup de choses; mais une chose est nécessaire; et Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée. » Luc 10 ; 41-42

Les auteurs des évangiles avaient bien compris la leçon du fait que Jésus faisait fi des standards religieux de l’époque puisque parmi les disciples il y avait aussi des femmes. Certes ce n’est qu’à la croix que Marc informe ses lecteurs que ces femmes avaient suivi Jésus dès le début de sa prédication. Ces femmes l’avaient suivi de Galilée à Jérusalem :

« Il y avait là aussi des femmes qui regardaient de loin, entre lesquelles étaient Marie-Magdeleine, et Marie [mère] de Jacques le mineur, et de Joses, et Salomé. Qui lorsqu'il était en Galilée, l'avaient suivi, et l'avaient servi; [il y avait là] aussi plusieurs autres femmes qui étaient montées avec lui à Jérusalem. » Marc 15 ; 40-41

Marc écrit cela peut-être parce que tous les disciples masculins avaient fui (Marc 14 ;50).

L’acceptation de ce Jésus non sexiste par l’Eglise chrétienne a été très tardive. Ce n’est qu’à la fin du XXème siècle que l’on parle de Pastourelles et de Rabines. Je crains qu’il faille encore longtemps pour  connaître des ImanES. Et elle lui est encore difficile d’exprimer « la liberté glorieuse des enfants de Dieu ».

Voilà une aventure qui serait enrichissante pour nos églises : trouver le passage de l’Evangile qui illustre l’événement de l’actualité.

Je crois que même nos petits enfants y trouveraient leur compte car que restera-t-il de la pensée biblique dans les générations à venir si la prédication de l’Evangile ne sert qu’à nourrir notre ego et favoriser notre individualisme. L’appel de Jésus n’est pas un appel à s’échapper des traumatismes physiques ou psychologiques de la vie, à trouver la sécurité, à posséder la paix de l’esprit. L’appel de Dieu en Jésus, c’est un appel à être pleinement humain, à, comme l’écrit Céline, être riche de cœurcar ce qui fait un homme plus grand que sa simple vie, c’est l’amour de la vie des autres…