Le hasard des lectures nous font découvrir parfois des pépites qui valent le détour et qui éveillent en nous des pensées qui semblent nous ouvrir les portes du royaume. Dans "Lettre à un jeune travailleur ", le poète Rainer Maria Rilke écrivait:

"Je n’arrive pas à comprendre qu’il ait fallu que la croix demeure, alors qu’elle n’était qu’un croisement. On n’aurait pas dû nous l’imprimer ainsi de toutes parts, comme on marque au fer rouge. C’est avec le Christ lui-même qu’elle aurait dû disparaître. Car n’est-ce pas cela : il a simplement voulu dresser un arbre plus haut, où nous puissions mieux mûrir ? Il est sur la croix, ce nouvel arbre en Dieu, et nous aurions dû en être les fruits magnifiques et chauds, tout là-haut." 

Un texte difficile à comprendre, voir à accepter quand on ne connait pas la christologie de l'auteur mais le "devenir un fruit magnifique et chaud" , tout en haut de l'arbre de la croix, ne pouvait pas mieux décrire le sommet de la vie humaine. 

La symbolique de l'arbre est très présente dans la Bible....dés la genèse jusque dans l'apocalypse. On se souvient de suite du Psaume 1 et de Jérémie 17 où l'homme est cet arbre planté au bord de l'eau.

Devenir un homme (ou une femme), c'est, comme un arbre, grandir ou mieux encore se laisser grandir patiemment. Grandir, spirituellement évidemment, comme un arbre c'est aussi accepter, joyeusement, si possible, les noeuds, les excroissances et se dire qu'un bel arbre n'est pas forcément celui qui a poussé tout droit.

Mais l'arbre ne grandit jamais aussi bien que dans la forêt entourer, encourager, protéger par les autres arbres sur lesquels lui aussi est appelé à veiller. On ne grandit vraiment que par la présence discrète et patiente de nos proches. Être patient envers l'autre, le conjoint, le parent, l'ami c'est le respecter en le laissant grandir à son rythme. La patience permet à chacun de devenir ce fruit magnifique et chaud.

Puisse nos familles, nos communautés, nos villages, notre pays devenir des forêts où il fait bon respirer l'air de Dieu.