Nous vivons, dans un monde fermé à double tour, verrouillé par des milliers, des millions de clés. Chacun a les siennes : celles de la maison et celles de la voiture, celles de son bureau et celles de son coffre. Et comme si ce n'était rien que tout cet attirail, nous cherchons sans cesse une autre clé : clé de la réussite ou clé du bonheur, clé du pouvoir ou clé des songes... Et, François Séjourné de conclure :

Toi, Seigneur qui as ouvert les yeux des aveugles et les oreilles des sourds, donne-nous aujourd'hui la seule clé qui nous manque : celle qui ne verrouille pas, mais libère, celle qui ne renferme pas nos trésors périssables mais livre passage à ton amour ; celle que tu as confiée aux mains fragiles de ton Eglise : La clé de ton Royaume.

Il me semble que cette clé les communautés émergentes de la pentecôte la possédaient.

Quand un ami, un membre, un frère arrivait d’un voyage, la communauté s’en réjouissait et si il voulait rester on lui trouvait un travail, si il devait continuer sa route la communauté lui donnait de l’argent pour sa nourriture.

Quand un ami, un membre, un frère tombait malade, la communauté s’occupait de lui ; si il mourait, elle l’enterrait à ses frais et prenait en charge sa veuve et ses enfants.

Quand un ami, un membre, un frère était mis en prison, ce qui était assez fréquent, c’était encore la communauté qui lui prodiguait aide et consolation.

L’attente du retour imminent de Jésus, le Messie, donnait beaucoup d’allant au respect de ce code de secours mutuel.

Le repas pris en commun était le lien qui « fédérait » les adeptes de ces communautés car il satisfaisait les besoins de tout le monde ;  autour de lui s’articulait toute la vie de la communauté.

Et le temps s’écoulait … « La multitude de ceux qui avaient cru n’était qu’un cœur et qu’une âme… » Actes 4 ; 32 et suivants. « … le nombre de disciples se multipliait beaucoup à Jérusalem… » Actes 6 ; 7.

Mais le temps s’écoulait … et le Seigneur tardait à revenir !

« Trouverais-je la foi à mon retour ? »« Où trouverons-nous de la nourriture pour un si grand nombre ? »

On s’est donc efforcé de convaincre les riches de soutenir la communauté appelée « Chrétienne » entre temps et ce, même, si ils ne respectaient pas rigoureusement le précepte du Seigneur qui stipulait que l’on devait donner au pauvres tout ce que l’on possédait. L’attention croissante prêtée aux riches modifiait, petit à petit, le caractère familial des repas pris en commun. Pour les disciples plus aisés, ces repas pris en commun n’avaient aucun intérêt en tant que repas. Ils mangeaient et buvaient mieux et plus confortablement chez eux (d’où la remarque de l’apôtre aux corinthiens) et si ils s’y retrouvaient, ils ne venaient que pour participer à la vie de la communauté, pour y exercer leur influence.

« Ainsi mes frères lorsque vous vous réunissez pour le repas, attendez-vous les uns les autres… » 1Cor.11 ; 30

Ce qui était, à l’origine, un besoin physique pour les uns devenait un besoin spirituel pour les autres en jouissant du pain et du vin d’une manière totalement symbolique.

C’est ainsi, qu’au IIème siècle, on a séparé les repas authentiquement pour les pauvres, de celui, symbolique du partage du pain et du vin destiné à la communauté dans son ensemble.

Au IVème siècle, on a écarté les « agapes » des lieux de rencontre des communautés devenues « Les églises ».

Il fallut bien du temps, voire des siècles, pour que des hommes et des femmes de valeur se mettent en quête de cette clé du royaume et redonner ainsi non seulement au Christianisme, mais aussi à de nombreuses communautés animées par l’amour du prochain, une réelle valeur matérielle et spirituelle.