Rosh Hashana, Yom kippour et Soukhot, trois épisodes festifs majeurs en Israël, viennent de se terminer et nous entrons dans le sicle des traditionnelles lectures hebdomadaires des "Parachiot" -pluriel de Paracha- qui débute avec "Béréchit". Avec ce billet nous méditerons l'histoire de Caïn, le premier homme qui eut un papa et une maman, qui eut des parents. A sa naissance, la réflexion de Eve : "J'ai acquis un homme de  l'Eternel." Gen.3 ; 19 est étrange.

Etrange sur deux points:

Le premier étant que si le lien génétique est bien établi avec Adam : "Adam connut Eve sa femme" Gen 3 que Chouraqui traduit: "Il pénétra Eve" tout se passe comme si, du moins dans la pensée de Eve, la paternité était attribuée à l'Eternel. D'ailleurs Adam disparaît dans la suite des événements et l'Eternel demeure le seul interlocuteur des deux frères, Caïn et Abel.

Le second n'en est pas moins curieux car Eve dit, version Chouraqui : "j'ai eu ''un homme'' de l'Eternel" et non: "J'ai eu ''un enfant'' de l'Eternel." Elle ne conçoit pas plus la paternité d'Adam qu'elle ne conçoit sa maternité. 

Avec beaucoup de retenue, je me demande s'il n'y aurait pas eu "un bug", une erreur, lors de la création. En effet, l'Eternel, YHWH, laisse au premier couple le soin de fonder l'humanité, d'exercer une fonction parentale dont ils ignorent tout d'où le tragique épisode de Caïn et Abel car, hormis le fait de s'entre-tuer, tout se passe comme si les premiers enfants n'avaient pas de parents.

Caïn devient le premier criminel de l'humanité, et quel criminel: assassin de son frère!

A qui la faute?

Pardonnez-moi mais pourquoi Abel était-il meilleur que Caïn pour être "Le béni de l'Eternel"? N'avons nous pas vécu de telle situation quand nous trouvons :" Que ce n'est pas juste que untel prospère alors que…."? Cela fait-il de nous des assassins?

Comment Caïn pouvait-il comprendre la leçon de morale ( Gen.4, 6 et 7) que Dieu lui inflige pour l'inciter à faire le bien plutôt que le mal? Pourquoi nos enfants peuvent-ils réaliser leur identité, réaliser qu'ils existent, qu'ils ont une vie à vivre? Seulement, si les parents les encouragent à assumer leur responsabilité de vie, leur donnent la possibilité de vivre leur vie.

Un billet précédent se terminait par cette interrogation: "Où sont les parents dans l’enseignement de Jésus ?"

"Quelqu'un lui dit: Voici, ta mère et tes frères sont dehors, et ils cherchent à te parler. Mais Jésus répondit à celui qui le lui disait: Qui est ma mère, et qui sont mes frères? Puis, étendant la main sur ses disciples, il dit: Voici ma mère et mes frères. Car, quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma soeur, et ma mère." Matt 12 ; 47… Nous sommes loin du " Honore ton père, honore ta mère!"

Que faut-il comprendre?

Les paroles de jésus présente une approche inattendue des relations entre parents et enfants. La famille n'est plus fondée sur le biologique, le lien parental devient relatif et fonctionnel.

"Jésus, voyant sa mère, et auprès d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère: Femme, voilà ton fils. Puis il dit au disciple: Voilà ta mère. Et, dès ce moment, le disciple la prit chez lui." Jean 19 ; 26-27 ou encore "Il dit à un autre: Suis-moi. Et il répondit: Seigneur, permets-moi d'aller d'abord ensevelir mon père. Mais Jésus lui dit: Laisse les morts ensevelir leurs morts; et toi, va annoncer le royaume de Dieu. Un autre dit: Je te suivrai, Seigneur, mais permets-moi d'aller d'abord prendre congé de ceux de ma maison. Jésus lui répondit: Quiconque met la main à la charrue, et regarde en arrière, n'est pas propre au royaume de Dieu." Luc 9 ; 59-60

En libérant la parentalité du biologique Jésus ne montre-t-il la voie à suivre pour être libéré de la contrainte de la loi? Pour être libéré de l'implacable malédiction qui fait que Adam et Eve ne pourront pas être de bons parents parce qu'ils voient dans leur parentalité le rappel de leur châtiment?

Alice Miller, dans "L'essentiel d'Alice Miller", écrit : "Si nous n'avons pas eu, enfants, la possibilité de vivre consciemment et de surmonter le mépris qui nous était infligé, nous le perpétuons… L'amour du prochain, le don de soi, l'esprit de sacrifice - que de belles formules - mais que de cruautés ne peuvent-elles pas cachées pour la simple raison qu'elles sont imposées à l'enfant… Mais nous sommes tellement habitués à percevoir tout ce qui nous est dit comme des prescriptions et prédicats moraux que la pure réflexion est parfois ressentie comme un reproche et n'est, par conséquent, absolument pas reçue."

N'est-ce pour cela que le seul "HOMME" véritable fut conduit à la croix?

Je me souviens de cette pensée de Héléne Berr dans "Journal"

Vendredi 31 décembre 1943
 :  Une fois que l'on commence à verser le sang, il n'y a plus de limites. Comme la morale et le respect de l'humanité disparaissent vite lorsqu'une certaine limite est dépassée. En un bond, on revient au stade animal. Il y a longtemps que les nazis ont rejoint ce stade.