La paracha de Noah est une paracha plaisante à entendre car elle nous rappelle les contes de notre enfance. Le thème du déluge est paradigmatique* dans la mesure où on le retrouve à la fois dans le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam, mais aussi dans toutes les mythologies du monde. L’arche de Noé est sans doute l’une des images les plus représentées dans l’iconographie biblique et celle qui a le plus de succès auprès des enfants.

C’est aussi la 23ème paracha – ésserim vechaloch ( כג ) – mais contrairement à כד – Kaf , Dalet (24) – qui veut dire « cruche » ou  כה – Kaf, He (25) – qui veut dire « ainsi », Kaf, Guimel (23) ne veut rien dire ! Si le mot ne signifie rien, on peut comprendre que seuls les créationnistes, les fondamentalistes affirment la véracité de l’histoire. Il faut savoir que le plus grand navire en bois, qu’on est construit au 19ème siècle ne mesurait que 67m de long et l’arche en mesurait le double ! Pour construire, en 1740, un navire de 60m de long et de 16m de large ( approximativement une demie arche) avec trois ponts, il fallait 2500 arbres, des chênes centenaires débités en planches avec lesquelles 1400 ouvriers mettaient entre 15 et 18 mois pour construire le vaisseau.

Même en cent ans, est-il concevable que 8 personnes ( Noé, ses trois fils et leurs épouses ) déboisent une forêt de 5 hectares, transportent plus de 5000 arbres, tressent des kilomètres de cordage, préparent des tonnes de goudron pour construire une « caisse » - Téva en hébreu – de 300 m de long sur 25 m de large et de 10 m de haut ?

Mais le thème du déluge est passionnant à étudier parce que c’est « une intrigue particulière qui est le produit singulier de l’imagination créatrice à partir de l’un des types de la tradition. Elle est le fruit du jeu de l’imagination réglée qui l’engendre comme une œuvre unique. Qui est essentiel à la production des textes de la littérature biblique » Paul Ricoeur *. Il nous faut le découvrir comme une ombre des choses à venir comme disait Paul ( Col. 2 ; 17 ).

C’est dans cette péricope qu’apparaissent pour la première fois, dans le texte biblique, des mesures mathématiques et géométriques de longueur, largeur et hauteur. Nous savons que les chiffres et les nombres hébraïques sont associés à des lettres.

Voici comment tu la feras: l'arche aura trois cents coudées de longueur, cinquante coudées de largeur et trente coudées de hauteur. Gen. 6 ; 15

Si nous combinons la lettre shin (300) avec les lettres noun (50) et lamed (30), nous pouvons lire le mot « lachon » qui signifie : « langue » aussi bien linguistique que anatomique. Les mesures de l’arche ne viendraient-elles pas nous dire quelque chose du langage ?

Je ne peux résister à aller un peu plus loin, en effet : 300= 10x5x6, 50= 10x5 et 30= 5x6 et vous le savez 10 est la V.N. du yod, 5 celle du et 6 celle du vav ; Yod-Hé-Vav-Hé est l’écriture du tétragramme :יהוה.

Si les mesures de l’espace de l’arche sont fondées sur le mot qui décrit le temps (Je suis celui qui sera), entrer dans le langage (l’arche), c’est entrer dans l’éternité (la vie éternelle), c’est donc en entrant dans la richesse du langage que Noé et sa famille, et donc toute l’humanité, furent sauvés du déluge ! …A tous ceux qui ont reçu la Parole – Le Logos – elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu… Jean 1 ; 12

Téva est un mot mais aussi une boîte! En jouant avec les mots, l’arche ne serait-elle pas dans son sens le plus littéral, tout simplement une « Boîte aux lettres » ? M.A. Ouaknin*

Mais bien sûr, vous n’êtes pas obligés de me croire !


*En français dans la texte : Lexique